Actuellement, en Guinée, si on
pouvait classer les secteurs d’activités qui
battent le record dans ‘’l’exploitation des jeunes diplômés guinéens,
l’enseignement privé primaire et secondaire serait parmi les tout premiers pour
ne pas dire le premier.
Pour
s’enquérir de cette réalité tangible, il suffit de faire tour dans certains
établissements d’enseignement privé ou
échanger avec les jeunes
cadres qui y évoluent.
Après
les études universitaires et dans le souci d’avoir une autonomie dans leur
nouvelle vie vis-à-vis de leurs parents
ou tuteurs, ces jeunes décident souvent
de se lancer dans l’enseignement privé.
Mais
hélas, ici, dans ce milieu où chaque
fondateur établit ses principes et règlements
de fonctionnement comme bon lui semble,
les jeunes diplômés, en quête d’un
premier, n’ont pas le choix et se
remettent toujours à leur volonté dans la gestion et le traitement. Plus grave, beaucoup parmi ces
responsables d’écoles privées
n’acceptent même pas d’établir en bonne et due forme un
contrat de travail. Et les salaires se négocient individuellement, du
primaire au lycée.
Pour
l’élémentaire, les salaires varient souvent entre 250.000 à 500 000 GNF le mois ;
entre 7500 à 15.000GNF par l’heure dans
les collèges et lycées ; pas de
primes de craies ou autres avantages
allant dans le sens de reconnaitre ou
encourager le bon travail.
Avec
ces faibles rémunérations, ces jeunes enseignants arrivent difficilement à
joindre les deux bouts. Se trouvant
ainsi dans une impasse, n’ayant pas autre recours et en quête du premier
emploi, ces jeunes diplômés
se lancent dans l’enseignement privé où règne la sous-traitance, la
mauvaise gestion, l’exploitation,
l’escroquerie, l’arbitraire, …
Enseignant
dans une école privée, Ahmed Bella
BALDE, marié et père de (4) enfants
explique son calvaire de tous les
jours. ‘’ Je suis dans cette école
depuis 2001et par la grâce de Dieu,
j’arrive à maintenir ma famille mais pas
plus. Cette école où j’évolue actuellement est la septième depuis que je me suis lancé dans cette activité
après mes échecs au Baccalauréat deuxième partie.
C’est dans l’espoir d’être un peu indépendant
et combler mes petits besoins que j’ai
décidé d’exercer ce métier. A chaque
nouvelle rentrée, on maintient les
anciens salaires pour les anciens et
nouveaux. C’est après deux ou trois mois de cours, les anciens peuvent avoir un rajout variant
entre 10.000 et 15.0000 GNF. Moi,
je suis à ma troisième année avec un
salaire de 450.000FG, si je ne
m’absente pas. Vous imaginez un père
de famille de (4) enfants .Franchement,
c’est un calvaire. Nous vivons de dettes .Je commence à prendre les dettes dès
le 10 de chaque mois juste après la paye entre le 1er et le 05. Ma
journée, je la passe à l’école et parfois dans certaines familles où je donne des cours à domicile. Ce qui me
touche de plus, les fondateurs ne pensent qu’à leur gain, l’humanisme fait
franchement défaut. Pour preuve, tout dernièrement, quand je suis
tombé malade, ce sont mes élèves de la sixième qu’ils ont demandé de cotiser
pour moi. Moi, je n’ai pas été
assisté et si c’était un membre de ma
famille, devinez le reste ’’,
interroge t-il.
Pour Ibrahima KAMANO qui évolue au secondaire, il
s’est dit toujours perturber dans les
calculs des heures dispensées à chaque fin de mois. ‘’ C’est
incroyable ! Vous allez voir un mois j’ai 80 heures, un autre 70 voire 65
heures. Or, c’était pour limiter mes multiples déplacements et accroitre mon
économie que j’ai
pris deux écoles. Mais, comme toutes les autres écoles privées de la
place, ces deux écoles ont aussi un cahier où on écrit les heures d’arrivée et heures de départ. A la différence, de
certaines écoles privées, dans ces écoles
où j’évolue, les absences non
justifiées, les jours fériés ne
sont pas tenus en compte .En plus, le
salaire est directement lié au nombre d’heures mentionnées dans ces cahiers. Mon
malheur est qu’il y’a des mois qui ne font pas 30 jours et une heure est payée à
8500 GNF. Mon salaire varie entre 680.000 et
552.500 GNF le mois. Mais depuis que les crises politiques ont commencé
en Guinée, je n’ai pas pu pousser le mois jusqu’au bout. Comme mes autres amis
enseignants, ce sont les dettes
et le café noir qui nous maintiennent. C’est pourquoi, il est rare de
voir un enseignant qui brille ou même
qui est gros. Nous souffrons dans ces
écoles privées et l’Etat ne pense même à nous. Après chaque prière, j’implore le
Tout –Puissant d’épargner ma famille et mes confrères des maladies. Je suis conscient
si par malheur un membre de nos
familles tombe malade, ça sera
une honte voire la mort de l’intéressé.
Je ne le cache pas. J’ai pas pu assurer
le quotidien, ce n’est pas traiter un malade que je pourrais faire’’
se lamente –t-il.
Chargé
de gérer un complexe scolaire privé de
la place, Monsieur Alseny Camara, se dit
heureux de sa façon de gérer son
personnel. Selon lui, son traitement est
proportionnel à l’effectif et qu’il ne
reçoit ni aide, ni subvention de la part
de l’Etat. ‘’ Comment est-que vous voulez qu’on donne plus que ce qui
rentre ? Nous, nous obligeons
personne. Chez nous ici, dés la rentrée,
on remet à tous les anciens et
nouveaux postulants notre nouvelle grille
salariale et règlement intérieur. Nous,
l’heure est payée à 17.500 GNF .Nous payons les congés et jours fériés.
Pour les assistances sociales, l’école a une caisse qui est alimentée
régulièrement par l’ensemble des professeurs, chacun déposé 2000 GNF après chaque
paye’’ M .Camara .
Rappelons
que contrairement à l’enseignement privé primaire et secondaire, les
enseignants du public bénéficient des primes de craies et autres encouragement.
Aujourd’hui,
les questions qu’on pourrait se poser, c’est le pourquoi un secteur aussi
important qui est l’éducation est tant
négligé et quel avenir prépareront pour nos enfants avenirs du pays si ceux qui sont
chargés de les former vivent mal et relégués au dernier rang.
Mouctar Diallo
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